mardi 11 septembre 2012

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Ces juges allemands qui défient la zone euro

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Par Patrick Saint-Paul Mis à jour | publié Réagir
Les juges de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe.
Les juges de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe. Crédits photo : ULI DECK/AFP

La Cour constitutionnelle de Karlsruhe rendra son avis, mercredi matin, sur le Mécanisme européen de stabilité (MES). Le dernier recours visant à retarder la décision a été rejeté. Berlin y voit un signe de bon augure.

De notre correspondant à Berlin

• Si les juges valident le fonds de sauvetage: le soulagement général

Si les juges valident le fonds de sauvetage MES, le président de la République fédérale, Joachim Gauck, pourra signer les textes ratifiant le MES et le pacte fiscal déjà adopté par le Parlement allemand à une majorité des deux tiers. Le MES, doté de 700 milliards d'euros - dont 190 milliards provenant d'Allemagne - pourra dès lors agir, sur le marché primaire (à l'émission des obligations) pour répondre à d'éventuelles demandes d'aide formulées par l'Italie et l'Espagne. La BCE pourra à son tour se lancer dans des opérations de rachats illimités d'obligations sur le marché secondaire, afin de faire baisser les taux d'emprunt des pays victimes de spéculation.

• Si les juges rejettent le MES: le risque d'éclatement ressurgit

Jugée peu probable par les experts en droit, cette hypothèse déclencherait la panique sur les marchés obligataires en remettant en cause toute future aide aux pays du sud de l'Europe frappés de plein fouet par la crise de la dette. Si les juges décident de bloquer le MES, la sortie de la zone euro des pays les plus affaiblis par la crise pourrait, dès lors, devenir inéluctable. Les conséquences en seraient «incalculables», selon le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble. Elles n'épargneraient pas l'Allemagne, première économie de la zone euro. Le gouvernement d'Angela Merkel se retrouverait totalement isolé sur la scène internationale et très affaibli sur le plan intérieur.

• Karlsruhe pourrait fixer un plafond financier, au grand regret de Paris…

Si les juristes anticipent une réponse positive de Karlsruhe, ils s'attendent aussi à ce que les juges fixent des garde-fous qui limiteront la marge de manœuvre de Berlin en vue d'une intégration européenne plus poussée. Les juges pourraient aussi réaffirmer les droits des députés allemands sur l'utilisation des deniers publics, en recommandant la création d'une commission spéciale du Bundestag, chargée d'étudier les demandes de recours au MES. Ils pourraient aussi fixer un plafond à l'aide financière, alors que certains experts estiment que son volume est déjà trop restreint pour venir en aide à l'Italie et l'Espagne. Cela bloquerait aussi définitivement les tentatives françaises visant à accorder une licence bancaire au MES.

• Qui sont ces juges surpuissants? Comment sont-ils nommés?

De sensibilité sociale-démocrate, le président de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe, Andreas Volksruhe, est désormais considéré comme l'homme le plus puissant du pays. Les quinze autres juges en robe rouge sont largement inconnus du grand public. Ils sont nommés pour un mandat non renouvelable de douze ans. Huit d'entre eux sont élus par le Bundestag (chambre basse) et le reste par le Bundesrat, selon des procédures différentes dans les deux cas. Ces juges sont répartis entre les deux chambres des cours supérieures.

• Leurs pouvoirs ont souvent été dénoncés par les chanceliers…

Créé en 1951, pour protéger la démocratie allemande contre les errements d'un régime autoritaire, et siégeant à Karlsruhe (Bade-Wurtemberg) le tribunal est le gardien de la Loi fondamentale de 1949. Ses juges ont pour principales compétences de veiller aux respects des droits fondamentaux, d'assurer la séparation des pouvoirs entre les différents organes de l'État, d'arbitrer les contentieux entre les normes édictées par les différents organes de l'État et de trancher lors de contentieux électoraux.
Depuis sa création, la Cour a plusieurs fois mis à l'épreuve la patience des dhanceliers, à commencer par Konrad Adenauer, qui la qualifiait de «dictateur de l'Allemagne». La mise en place des mécanismes de sauvetage européens ont contraint Angela Merkel de flirter avec les limites de la Loi fondamentale. Son action est constamment freinée par les «sages», que la chancelière a comparé à des scorpions.

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